L’insuffisance rénale chronique (IRC)

L’insuffisance rénale chronique (IRC)

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L’IRC, qu’est-ce que c’est ? 

L’insuffisance rénale chronique (IRC) est un terme qui désigne les divers problèmes pouvant affecter la santé des reins incluant la présence d’un dommage aux reins et la diminution graduelle de la fonction rénale sur une période de 3 mois ou plus, et ce, quelle qu’en soit la cause. 

Une IRC est généralement détectée grâce à différentes analyses sanguines et est clas-sifiée en divers stades (stades 1 à 5), selon son degré de sévérité. Le stade 1 réfère à une fonction rénale normale alors que le stade 5 désigne une insuffisance rénale ter-minale, soit une détérioration significative de la fonction rénale requérant des traite-ments tels que la dialyse ou encore la greffe rénale. 

En général, l’IRC s’aggrave progressivement au fil du temps et vous ne ressentirez probablement aucun symptôme avant d’avoir au moins atteint un stade d’IRC mo-déré (stade 3 et +). C’est pour cette raison qu’il est primordial de connaître les mul-tiples facteurs de risque de l’IRC et de prendre des actions concrètes pour tenter d’en ralentir la progression, puisqu’il n’y a pas de traitement pour guérir l’IRC. 

Causes et facteurs de l’IRC 

Si on exclut les anomalies ou maladies rénales qui sont présentes dès la naissance ou durant l’enfance et certaines maladies génétiques qui expliquent parfois l’IRC (ex : his-toire familiale de maladie rénale), la majorité du temps, l’IRC apparaît avec l’âge et est associée à d’autres maladies chroniques. Les principaux problèmes de santé qui sont responsables de l’IRC sont le diabète et l’hypertension artérielle, particulièrement s’ils sont mal contrôlés, d’où l’importance de bien les traiter. 

Parmi les autres facteurs de risque de l’IRC, on compte le tabagisme, la dyslipidémie (cholestérol), l’âge avancé (> 65 ans), un surplus de poids, la sédentarité, la prise de médicaments toxiques pour les reins (médicaments néphrotoxiques) et divers pro-blèmes touchant le système urinaire (infections urinaires à répétition, calculs rénaux, antécédents ou cancer actif du rein, de la prostate, etc). 

Les infections virales chroniques fréquemment observées chez les utilisateurs de drogues injectables telles que le VIH ou l’hépatite C semblent également être des fac-teurs de risque supplémentaires de l’IRC, tout comme le fait d’être issu de certaines origines ethniques (autochtone, asiatique, sud-asiatique, africaine-antillaise, etc). 

Complications et symptômes de l’IRC 

Si l’IRC n’est pas décelée précocement et prise en charge de façon appropriée, elle est as-sociée à un risque accru de maladies cardiovasculaires (hypertension, dyslipidémie, infarctus du myocarde, AVC, insuffisance cardiaque, etc.), d’infections, de mauvais pronos-tic (évolution vers une IRC terminale) et de mortalité prématurée, et ce, peu importe la cause de l’insuffisance rénale. 

L’IRC avancée peut également causer des désordres électrolytiques (désordres du potas-sium, magnésium, etc.) et de l’anémie. Si vous présentez ces complications, vous pourriez notamment ressentir de la fatigue, une perte d’appétit, étourdissements, difficulté à l’effort ou «perte de souffle», une intolérance au froid ou encore des démangeaisons. 

Des anomalies liquidiennes sont également observées dans les stades les plus avancés de l’IRC, telles que de l’enflure autour des yeux, des mains ou des pieds. Des troubles uri-naires sont souvent rapportés tels qu’une urine trouble, un besoin fréquent d’uriner durant la nuit, mais aussi une quantité d’urine moins abondante due à une difficulté à uriner. 

Comment prévenir la progression de l’IRC ? 

Puisque l’IRC est une maladie d’évolution lente, un élément clé est de s’assurer du contrôle optimal de vos autres problèmes de santé. Le maintien de saines habi-tudes de vie est aussi essentiel en vue de ralentir la progression de votre IRC et d’éviter d’atteindre une IRC terminale. Voici quelques astuces : 

  • Restreindre sa consommation en sel et avoir une alimentation saine et équilibrée 
  • Maintenir un apport en liquide adéquat, tout en consommant l’alcool et la caféine avec modération 
    • La caféine et l’alcool sont des substances qui accroissent les besoins en eau de votre organisme et qui peuvent favoriser la déshydratation. La déshydratation augmente le risque de toxicité rénale. 
  • Si vous êtes fumeur, envisager une cessation tabagique 
  • Faire de l’activité physique selon vos capacités, en vue de maintenir un poids santé; 
  • Assurer un contrôle adéquat de votre diabète, hypertension artérielle ou cholestérol 
    • Prenez vos médicaments conformément aux recommandations de votre pro-fessionnel de la santé. 
  • S’assurer que l’ensemble de votre médication est adéquatement ajustée selon votre fonction rénale 

Les médicaments néphrotoxiques à éviter 

En vente libre 

Il existe plusieurs médicaments pouvant causer d’importants dommages aux reins, qu’ils soient utilisés de façon brève ou prolongée. Or, ce ne sont pas uniquement les médicaments sur prescription qui peuvent être néfastes pour les reins, mais aussi des médicaments que vous pouvez vous procurer sur les tablettes en pharmacie sans pres-cription, incluant les produits de santé naturels et les vitamines. Parmi les médicaments en vente libre à éviter, on trouve : 

Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène (Advil, Motrin) et le naproxen (Aleve) 

  • Peuvent causer des lésions aux reins ou aggraver une IRC, surtout lorsque pris de façon prolongée ou à dose éle-vée. 
  • Si possible, privilégier l’acétaminophène (Tylenol), qui est sécuritaire. 
  • Si un anti-inflammatoire est requis, consulter votre médecin ou votre pharmacien et prenez la plus petite dose efficace pour la période la plus courte possible et assurez-vous d’avoir une bonne hydratation. 

Les différents produits contre la toux, le rhume et la grippe 

  • Certaines formulations commerciales contiennent des AINS qui peuvent aggraver votre IRC, mais également des décongestionnants qui peuvent augmenter votre tension artérielle. 

L’acide salicylique (Aspirine) à haute dose 

  • L’aspirine de bébé (81 mg) n’est pas nuisible, mais des doses d’aspirine plus élevées retrouvées en pharmacie peu-vent être toxiques pour vos reins et doivent être évitées. 

Médicaments contenant des électrolytes (ex : magnésium, aluminium, phosphate, etc.) 

  • Lavements ou laxatifs (ex : lait de magnésie, Citro-Mag, etc.) 
  • Antiacides riches en magnésium ou en aluminium 

Les produits de santé naturels (PSN), vitamines et suppléments 

Les PSN et/ou les plantes médicinales (ex : plantes chinoises) ne sont pas toujours réglementés de la même façon que les autres médicaments approuvés par Santé Canada. Leur liste des ingrédients est donc parfois inexacte ou in-complète. Certaines plantes médicinales peuvent contenir des pesticides, des métaux et d’autres composants poten-tiellement dangereux et nocifs pour vos reins. De plus, ils sont susceptibles d’interagir avec vos autres médicaments. 

  • Évitez d’acheter un produit de santé naturel qui n’a pas de numéro de produit naturel (NPN) ou de numéro d’identification d’une drogue (DIN), car la présence de NPN ou de DIN vous indique que le médicament a été exa-miné par Santé Canada. 

Certains PSN, vitamines ou suppléments contiennent des diurétiques (ex : tisanes amaigrissantes) qui risquent de vous déshydrater ou encore des taux élevés d’électrolytes comme du potassium ou de magnésium, ce qui peut ag-graver votre IRC. 

Certaines vitamines renfermant des doses excessives de vitamine C (> 500 mg/jour), qui pourraient favoriser l’appa-rition de pierres aux reins, ce qui est nuisible lorsque vous souffrez d’IRC. 

Autres substances 

En plus des médicaments en vente libre, la consommation de certaines drogues illicites comme la cocaïne ou l’héroïne est à proscrire vu les lésions qu’elles peuvent causer à vos reins. 

Les médicaments néphrotoxiques à éviter 

Sur prescription 

Plusieurs médicaments sur prescription ont aussi le potentiel d’être toxiques pour vos reins, qu’ils soient pris seuls ou en combinaison. Y figurent notamment : 

Les inhibiteurs de la COX-2 (fréquemment utilisés en douleur) 

  • Ex : Celecoxib (Celebrex®) 

Les diurétiques (utilisé pour contrôler la pression artérielle ou en présence d’enflure) 

  • Ex : Furosémide (Lasix®), hydrochlorothiazide (Hydrodiuril®), spironolactone (Aldactone®), indapamide (Lozide®), chlorthalidone (Hygroton®), etc. 

Le lithium (utilisé dans certains troubles de l’humeur) 

Les antibiotiques sulfamidés (utiles pour traiter diverses infections comme les infections urinaires) 

  • Ex : Trimethoprine + Sulfamethoxazole (Septra DS® ou Bactrim®) 

Certains autres médicaments ont aussi le potentiel de nuire à vos reins court terme, mais à plus long terme, ils of-frent une protection rénale en ralentissant la progression de votre IRC. Il est donc très pertinent de les avoir à votre profil pharmacologique avec une surveillance des analyses sanguines dans les premières semaines suivant leur instauration ou suite à une augmentation de dose. Parmi ces médicaments, on retrouve : 

Les médicaments utilisés pour le traitement de l’hypertension artérielle 

Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) 

  • Ramipril (Altace®), Perindopril (Coversyl®), Trandolapril (Mavik®), enalapril (Vasotec®), fosinopril (Monopril®), etc. 

Les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA) 

  • Candesartan (Atacand®), irbesartan (Avapro®), telmisartan (Micardis®), Valsartan (Diovan®), Olmesertan (Olmetec®), etc. 

Certains médicaments pour le diabète 

Inhibiteurs du co-transporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2) 

  • Empagiflozine (Jardiance®), Canagliflozine (Invokana®), dapagiflozine (Forxiaga®), etc. 
  • Médicaments combinés contenant ces ingrédients 

Les médicaments néphrotoxiques 

En résumé 

Bref, une fois le dosage de ces médicaments stabilisé et adéquatement ajusté selon votre fonction rénale, il y a peu d’inquiétude à avoir vis-à-vis ces agents, à moins que vous développiez une déshydratation (ex : gastroentérite sé-vère) ou que vous débutiez un nouveau médicament ou produit de santé naturel ayant le potentiel d’interagir avec ceux-ci. 

Bien que la prise de ces divers médicaments de vente libre ou de prescription ne soit pas contre-indiquée, la pru-dence est de mise et un suivi des analyses sanguines évaluant votre IRC est primordiale. 

Dans la mesure du possible, il faut éviter de combiner plusieurs de ces médicaments entre eux ou avec des produits de santé naturels, car le risque de dommage rénal augmente de façon significative avec le nombre d’agents néphrotoxiques impliqués. N‘oubliez pas de consulter un professionnel de la santé qui sera en mesure de vous aider à gérer votre médication. 

Autres mesures préventives 

Examens requérant l’utilisation d’agents de contrastes iodés 

Plusieurs autres mesures préventives sont requises chez les personnes souffrant d’IRC, notamment en prévision d’un examen médical qui requiert l’utilisation d’agents de contraste iodés, qui sont très toxiques pour les reins, comme un examen en radiologie. Dépendamment du stade de votre IRC, le risque de toxicité rénale associé aux agents de contraste iodés est variable. 

En général, lorsque votre IRC est légère (stade 1 ou 2), aucune mesure préventive particulière n’est requise lors de l’utilisation d’agents de contraste iodés. Par contre, dès que votre IRC est considérée comme modérée (à partir du stade 3), il importe d’en aviser le professionnel de la santé, car vous aurez probablement à recevoir une solu-tion d’hydratation pour prévenir la toxicité rénale secondaire aux agents de contraste par voie orale ou intra-veineuse, selon la sévérité de votre IRC. 

Si vous souffrez d’une IRC avancée, il est probable qu’on vous suggère un examen médical alternatif, lorsque possible. Dans tous les cas, du moment que vous souffrez d’IRC, des analyses sanguines de contrôle devront être effectuées après votre examen médical, s’il y a eu utilisation d’agents de contraste, pour assurer la surveillance de votre fonction rénale. 

Certains professionnels de la santé vont aussi recommander de suspendre les anti-inflammatoires (AINS) 24 heures avant la procédure avec agents de contraste iodés et ce, jusqu’à l’obtention des résultats de votre contrôle d’analyses sanguines, le cas échéant. Dans un même ordre d’idée, vos médicaments pour la pression (IECA/ARA, diurétiques) ou pour le diabète (metformine, SGLT2) devront généralement être suspendus le jour de l’exa-men avec agents de contraste iodés ou jusqu’à l’obtention des résultats de votre contrôle sanguin post-examen. Informez-vous ! 

Ces mesures ressemblent énormément aux précautions à prendre lorsque vous êtes malades et à haut risque de déshydratation, c’est-à-dire lors des journées de maladie ! 

Autres mesures préventives 

Que faire lors des journées de maladie pour ne pas endommager vos reins ? 

Si vous êtes malade et avez des nausées, vomissements ou de la diarrhée (ex : gastroenté-rite sévère) et que vous êtes incapable de vous hydrater suffisamment, certains des médi-caments que vous prenez pourraient endommager vos reins ou vous causer d’autres effets secondaires (ex : hypoglycémies si vous êtes diabétique). 

Autres mesures préventives 

Que faire lors des journées de maladie pour ne pas endommager vos reins ? 

Si vous n’êtes pas en mesure de boire et de vous hydrater suffisamment, les médicaments suivants devraient être interrompus, et ce, jusqu’à ce que vous soyez en mesure de man-ger et de vous hydrater adéquatement à nouveau : 

Médicaments pour le diabète 

  • Metformine (Glucophage) 
  • SGLT2 (voir exemples ci-haut) 
  • Glyburide (Diabeta) 
  • Gliclazide (Diamicron) 
  • Glimepiride (Amaryl) 
  • Etc. 

Médicaments pour la pression 

  • IECA/ARA (voir exemples plus haut) 
  • Inhibiteurs directs de la rénine (ex : aliskiren ou Rasilez) 
  • Diurétiques (voir exemples ci-haut) 

Anti-inflammatoires 

  • Anti-inflammatoires non-stéroidens ou AINS (voir exemples ci-haut) 
  • Inhibiteurs de la COX-2 (voir exemples ci-haut) 

Médicaments pour rhume et grippe vendus en pharmacie 

  • Plusieurs produits 

Informez-vous auprès de votre pharmacien ! 

Autres mesures préventives 

La vaccination 

Tous les patients souffrant d’IRC, devraient s’assurer d’avoir une vaccination de base à jour. À cela, on re-commande d’ajouter une vaccination annuelle contre l’influenza (grippe). Chez les patients avec IRC avan-cée (stades 4-5), il sera également suggéré que les membres de la famille directe soient aussi annuellement vacci-nés contre l’influenza, pour minimiser le risque d’infection. 

En effet, plus le stade d’IRC est avancé, plus le risque d’infections est élevé, plus particulièrement le risque d’infections pulmonaires. Cela dit, peu importe le stade de votre IRC, une 1ère vaccination contre le pneumocoque vous sera recommandée, puis répétée aux 5 ans pour éviter les formes graves de pneumonies. Votre équipe de soins pourra vous guider sur le choix de vaccin approprié contre le pneumocoque. 

Enfin, si vous souffrez d’une IRC avancée (stades 4 et 5), vous êtes plus à risque de souffrir d’hépatite B et vous devriez recevoir une vaccination adéquate contre cette maladie. 

Conclusion 

En conclusion, l’IRC est une maladie complexe et multifactorielle. Même s’il s’agit d’une maladie généralement asymptomatique, si elle n’est pas décelée et prise en charge adéquatement, elle risque d’évoluer de façon défavorable et de progresser vers une IRC terminale, mais aussi de causer d’autres dommages comme certains problèmes cardiovasculaires. 

Voilà pourquoi il importe de comprendre la maladie, ses causes, ses complications et les divers moyens d’en prévenir la progression. Une connaissance des médicaments à éviter, de l’importance d’avoir de saines habi-tudes de vie, une vaccination à jour, mais aussi des précautions à prendre en prévision de certains examens médicaux et lors des journées de maladie est un atout. 

Un travail de collaboration avec vos professionnels de la santé est primordial, puisqu’ils seront capables de vous épauler avec votre IRC en répondant aux diverses questions que vous pourriez avoir sur la maladie. Ils s’assureront du suivi de vos analyses sanguines pour surveiller l’évolution de votre maladie et de l’ajustement adéquat de votre médication. N’hésitez pas à vous référer à eux ! 

Un vidéo disponible sur le site web du GMF-U Les Eskers d’Amos pourra aussi vous aider à mieux comprendre l’IRC. 

N’hésitez pas à le consulter ! 

Rima Koubaa, votre pharmacienne GMF